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Bruno Toméra

ouvrier mécanicien, ajusteur de poésie, chercheur d'étonnements...

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  Accroche-coeurs  
  Arène obscène
 Assis sur le gourbis des pensées  photos bt fusionnées par cm
Atelier poste du matin 
Centre de Létra
Cette gouine voulait m'endoffer   illust. de jlmi 
Cette ronde infernale pieds nus sur un tapis d'éclats de verre  photo jlmi 
  Couloir d'urgence
Crash test   chanté par Baissac 
   Des gouttelettes de vie dans ma main pleine de morve   
 Disc jockey 
Encre de Chine  illust. de Popofe Dumont  
Entre Dijon et Nancy  
Evelyne
 
Funérarium  llust de jlmi 
  Garde le piaf des Urgences dans ton cœur  photo x
Gerda
Horizons
Il y a ceux... 
 Impromptu Intermède
 Intermède estival avant d'immanquables jours d'hiver ill. Natalie Frank
La rhapsodie des cafards
Le Dialogue silencieux  illust. de Popofe Dumont  
Le Grand Ordre de l'Univers   photo x
Le Meilleur Coup de la Terre
 Le nouveau testament personnel et subjectif 
Léna
Les éclats de la pulsion  photo bt
  Message  photo bt
 Nous regardons  illust. de jlmi
Ophélie  
 Oraison après date de péremption  
Pièces rapportées  lu par Baissac 
Physique du Poivrot  
Poème de la fatigue, dans  l'impasse de la gare d'Annecy  
illust. de jlmi 
Régalade galante  illust. de Popofe Dumont  
Remuer le Silence  
Sous cet orage du printemps
  Un autre de ses fils
Une Nuit gueugnonnaise
 

 

 

 

Couloir d'urgence.

 

Nous sommes assis au bord du vide
sur ces sièges vissés dans l'éternité
nos mains se tendent et interpellent le silence
nos mains se tendent et se déchirent à espérer.
L'on rejoue l'enfance
nos vies sur le jeu de l'oie
se poursuivent et se croisent
au hasard du coup de dé.
Se forcer à penser ceci pour conjurer cela
entre croire et l'abandon
il y a tant de déraisons
bien humaines.
Devant la crainte et le mystère
on influence que soi.
Être est ce trop de vérité.
Nous raidis dans ces habits
taillés par l'absence
transpirons des regrets
et quelques fous serments
que nous mélangeons à jamais imparfaits
dans de fausses conjugaisons.

mis en ligne mai 2012

oOoOo

 

 

Intermède estival avant d’immanquables jours d’hiver
   
 
ill. d'après Natalie Frank
 
Nue, elle ne portait qu’un chapeau de paille
sur ses longs cheveux bruns,
elle écrivait à mon goût de mauvais poèmes de guéridon
derrière une astronomique baie vitrée
face au chemin communal,
à 49 ans elle était belle, le temps s’essoufflait à la rattraper.
Tous hommes défilaient devant la très confortable masure,
des rabougris claudicants, des gamins rigolards,
des vieux schnocks aux mégots asphyxiés,
des coureurs de fond du dimanche au ralenti,
de romantiques ados émoustillés et graves,
de jeunes péquenots sur leur rutilant tracteur à cent millions,
un vrai boulevard.
Quand elle me prenait la tête
avec ses interrogations insipides & nostalgiques
du genre ‘’Pourquoi ce monde est-il si injuste ?’’
‘’ Mon existence a-t-elle un sens ?’’ ‘’Patati & patata ?...’’
je fonçais droit au bistrot du village
valider mon loto et me reteinter aux rouges limés.
Les sourires entendus des habitués du zinc
semblaient me dire qu’ils en savaient plus que moi
sur mon intimité et c’était peut-être vrai.
Bourré, je rentrais écouter ses dernières créations poétiques
sur le comment indigné du cela et le pourquoi vengeur du ceci, c’était pleurnichant.
Englué à la guimauve,
j’avais beau lui rabâcher qu’il n’y avait pas de réponse
dans le bric & le broc du monde,
tout au mieux on pouvait enjoliver une question
et si c’était toujours une question
ça prenait l’apparence d’une réponse dans la tête des crédules, l’esbroufe faisait tourner la vie depuis des lustres,
Darwin avait mis le doigt dessus
et dieu en était retourné jouer le représentant de commerce
dans un univers parallèle.
Elle me regardait fâchée  & vexée,
je la prenais dans mes bras
et n’avait que l’effort de lui ôter son chapeau de paille.
Elle écrivait à mon goût de mauvais poèmes
mais elle baisait comme seule une poétesse sait le faire.
 

mis en ligne en mars 2012

oOoOo

 

 

 

Léna c'était à l'époque où j'étais soldat ( comme on disait à l'époque ) coincé à Lons dans un bouiboui entre la sale gueule du patron et des vantards comme seule l'humanité sait en créer,Léna m'a tapé dans l'oeil, saoule et insolente, revêche, on a parlé de nos mélancolies en essayant de gratter le patron d'une tournée ou deux et puis on est retourné dans la nuit chacun dans le brouillard qui nous envelopperait tous pour de bon un de ces quatre.

 

 

Léna 

flash back : Lons le Saunier   Noël 1979

La vieille putain 
65 piges moi vingt 
accrochés tous les deux 
à nos fonds de verres vertigineux 
"La retraite mon gars 
c'est l'avant dernier creux" 
qu'elle gueulait Léna... 
Je crois, elle s'appelait... 
 
Le sourire jauni, carié, défait, 
c'est l'instant vitreux du passé qui se ride 
contre le comptoir crasseux. 
J'étais le buvard du mensonge 
délirant de ses songes 
suffocant de l'inertie du vide 
et de quelques sueurs moites et têtues 
griffant le visage d'aigreurs mal foutues. 
Lueur blafarde des ampoules 
c'est pas "Euréka" de l'amour j'en voulais pas 
et les barmaids tiraient sur la foule 
au champagne les bouchons 
comptant les munitions 
pour 15 sacs en plus explosaient de mesquines excitations 
 
Léna petite fille agonisante de la tendresse 
fringuée "Vogue Vieillesse" 
faisandée de trop de réalités 
de couloirs bruissements et chuchotements,
de serviettes tachées en éviers enrhumés. 
Et l'utopie qui pourrit d'un rêve amant 
toi le bifteck qui n'a plus de prix. 
Serrant mes mains dans ses mains 
elle me dit 
"Gamin, c'est une bulle de savon, la vie, 
ça pique les yeux et c'est fini." 
On a roulé sur le trottoir. 
Bras dessus bras dessous.
Le temps est plus bourré que nous, 
tous les deux c'est trop tard, 
elle en avance, moi en retard. 
Tchao, à la revoyure, ange des poubelles, 
si les ordures coupent pas nos ailes

 

 

 

texte extrait de ''Une partouze chez les Acariens''  ed le Ravachol   1999   ill par Pascal Ulrich & Bruno Toméra

 

 

 

 

 

 

 

Arène obscène

Sang du taureau
sous l’épée marteau
voile d’un rideau
les yeux fous de douleurs
mugissement de la peur
soubresaut de la tête
entêtées à inspirer des éclats d’oxygène
sable et sang obstruant les naseaux
derniers coups de reins
derniers coups de pattes
du magnifique corps d’airain
Courbes brisées couchées sur le flanc
les cornes percutent et se soulèvent
et percutent encore et encore
le sol poussiéreux du cagibi des névropathes.
Peuplade tarée
hurle sa jouissance
peuplade religieuse
glorifie la souffrance
peuplade artistique
et de bonnes manières
peuplade de maquignons
qui torture aux sons des " traditions "
Triomphant

Un clown calamiteux à paillettes
sert de fusible à la démence
des spectataires zombies
qui insultent la vie.

 

2005   mise en ligne juillet 2011

 

 

La rhapsodie des cafards  
 
 
 
Le drap noir pétale froid et chiffonné
recouvre mes nuits blanches
la lueur moite de l'ampoule
s'enroule sur le verre sans fond de la bouteille
et mes vieilles chairs de poule
pèlent et s'entassent sur les débris de la corbeille
j'ai courtisé tant de " Peut-être... "
j'me suis perdu dans le foutoir des sentiments
à gerber sous des fenêtres
sur ce foutu trottoir
je ne sais plus où ni comment
 
ça gueule dans le mouroir
la rhapsodie des cafards
 
Martine arrache un à un ses cheveux blancs
elle abandonne bien des choses
après des chichis et quelques poses
elle se raconte clôture de compte
que c'est la vie qui n'a pas su
lui apprendre à s'éterniser
dans le verbe aimer
son cœur démaquillé ne s'habille plus
que de l'ombre de l'ombre
et aux rythmes fatigués de ses pas
ce soir
c'est l'trottoir qui s'éloigne du haut de ses bas
 
ça gueule dans le mouroir
la rhapsodie des cafards
 
Jeannot deux ans après sa lettre de licenciement
vient de recevoir un avis de l'huissier
qui charmant l'invite à dégager de son logement
il n'a jamais eu autant de courrier
ça ne le rend pas plus content
jugement de divorce sa femme a mis les bouts
pour un précaire de chez " Bouche- Trou "
Jeannot a beau se dire qu'aucune Belle
ne vaut un trou dans la cervelle
mais même entre deux vins
il ne croit plus en rien
il pense révolution et range ses tiroirs
qui seront de toute façon piqués demain
sur le trottoir
 
ça gueule dans le mouroir
la rhapsodie des cafards
 
Quand le ciel se colore en gris poubelle
le monde entier accuse la météo
moi je sais que c'est le soleil
écœuré qui se saoule dans un bistrot
tellement il en a marre de nous voir, de nous voir
valser dans la rhapsodie des cafards... des cafards.. des cafards...

 

mis en ligne en juin 2011

 

 

 

Un autre de ses fils

 

 

je l’ai rencontré dans un caboulot rue Mercière à Lyon. 
Un brasier rouge d’accent du sud,
supporter clodo de l’OM, 
on a parlé autour d’un picrate de tout et surtout de rien.
Il était paumé, ça tombait bien, on avait du temps.
On s’est retrouvé à Avignon quand les contrôleurs
nous ont débarqué sur le quai, 
même les flics n’ont pas effacé de ses yeux cette petite lueur ravivée.
Lézards sous la chaleur des remparts, on matait les filles
« wahoo t’as vu celle là» 
« canon » 
« j’te lui en ferais bien péter un coup »
Rien que de l’humain désenchanté 
quand tirer une crampe avec d’inaccessibles silhouettes 
s’apparente à s’envoyer en l’air avec des cauchemars bien mûris.
On a poussé à dix on ne sait trop comment 
sauf que là des romanos nous ont braqué.
Les pauvres volent que les pauvres, c’est plus facile.
Aux coups de poing, ça allait, quand ils ont sorti les surins
je leur ai filé la petite monnaie,
la gueule éclatée, d’autres flics nous ont empaqueté
puis on a débarqué à St Charles sans contrôle.
Le soleil hurlait, la ville aussi, les morts marchaient,
tout fonctionnait.
Ses adresses sont bidons, on a bu fait la manche et rebu,
il s’est mis à trembler, à déconner raide et pis il est tombé en râlant. 
Y a fallu du temps avant que les marins pompiers
l’embarquent dans leur sillage dantesque.
M’ont rien demandé, ni son nom que je ne connaissais pas 
ni ses vieux rêves déguenillés.
La mer, là-bas il y avait l’Afrique une autre « Mère » qui
se demandait comment elle avait pu engendrer une telle bande
de ridicules anxieux, fabricants de la misère qui se goinfrait
de famines, de sida, de guérillas et de contrées détruites.
Une mère qui n’aurait jamais assez de larmes.
J’ai cru poser un moment ma tête sur l’épaule de la Madone dorée.
Il n’y avait pas de miséricorde, 
il n’y avait rien que des corps qui fonçaient droit vers le néant. 
Je lui avais ramené un de ses fils.
J’avais pu qu’à aller me faire voir ailleurs.

 

Horizons 

 



Les nuages alezans trottent
sur les pâturages nécropoles
et pleurent des larmes de grès
dans les espaces clos du silence
mon cœur essuie dans cette course
la bave des sacrifices l'écume des labeurs
et conjure au jour déclinant
l'offrande du repos apaisant
tout bouscule l'ordre de la mort
si confuse si abstraite
comme une négation de plus à notre unique existence
et mes jambes trop maigres
ma portent incrédule vers l'effroi
du dernier refuge
ou la main humaine pourtant tue sans trembler
et mes prières sont vaines
étouffées par le calvaire des hennissements raides et cassés
puis leurs pattes poussiéreuses en soubresaut
s'infiltrent dans mes éponges asthmatiques
mes pas s'acoquinent alors aux empreintes des chevaux
qui vont dans l'hiver chercher fortune
près des rivières d'étoiles glacées
et ma chevelure se fond dans leurs crinières décolorées
et nous galopons vers d'autres libertés

 

 

 

 

 

Centre de Létra

  Découvrir la nudité froide, aride, près des plastiques poubelles de
déchets indivisibles liées à l'être. Courir, marathon dément.
Je m'étends sur des os de dépouilles chevalines, leurs dents riant
dans mes poumons et mon squelette reconnaît ces frères. Chaos
ivresse acharnée du devenir.
Je répands mes cellules vitrifiées d'explosions d'atomes sexes,
d'atomes liqueur, millions d'ouvrages désœuvrés oeuvrant à négocier
le parcours ferraillant de l'humain.

 
photo anonyme traitée jlmi 


  N'être rien de plus qu'une ruelle de nuit, qu'un galion nucléaire prêt
à se saborder, qu'un rejet d'égout sur d'inévitables rengaines ajustées
peut être à la nuance du cœur... Palpitant...
Palpitant, crachant le sang, remonte par le flexible de la transfusion et
je sens cette aiguille aiguillant sous mes nippes, ça bouffe les tripes
vitaminées, valiumisées.
Ce télescopage du shoot sulfate magnésium brûle mes éternités ou se
pressent les enzymes et leur partouze m'enthousiasme.
Je suinte cette cosmologique planète par les globules qui se neutralisent
électrifiant mon avenir et ses terreurs : jours, mois, années, déjà...
        François, l'ami épileptique de la chambre onze, crie à refouler ses silences.
Il est trois heures du matin, seul, entouré de la clarté pâle d'une machine à café,
j'intercepte des sons nasillards, stridents en des accumulations d'émotions
reflets hypnotiques de ces êtres qui s'engouffrent en moi en des rayonnements
tentaculaires de doutes, d'espoirs et nous traçons des dérisions théâtrales de
notre humanité que nous suggérons aux traîne-savates de la normalité.
  Nous ne sommes que des braillards d'amour perdus dans l'inconstance de la vie.
Ces êtres, je les aime tous.

 

 

 

Cette gouine voulait m'endoffer
les pupilles souriantes comme deux aimants attirants
accentuaient la blancheur des yeux
elle harnachait à ses hanches roses
les lanières d'un gode d'ébène luisant
avec cette patiente dextérité de l'expérience
avec ce détachement BCBG qui fait de l'extraordinaire
une habitude de plus. Blasée.

illustration jlmi

Je travaillais smicard dans cette banlieue lyonnaise
8 heures de carcan surnageant plancton perdu
au milieu d'un océan d'huile hydraulique
le dos voûté sous les vachardes angoisses existentielles
d'un chef évadé depuis ses premiers émois pubères
vers un autre espace temps.
Peur de l'anpe de crever anonyme
affamé parmi les indifférents.
Peur et espoir ces notions là
vous font atteindre des sommets de négation de soi.

Je fis connaissance de Lydie étudiante en économie
future fourgueuse d'euphories coûteuses et inutiles
au cours d'une conférence où l'orateur
semblait de beaucoup préférer les rondeurs des filles
que les contours de son propre discours.
Ma quête intellectuelle n'ayant en ces temps plus de limite
je brossais les pompes des Christ de salon, Sollers de sanitaire,
Francis Bacon des gribouillages en bâtiment
le moindre binoclard langage ardu
me couvrait saint Martin d'un fichu des connaissances
postulant je briquais une chaire dans le cénacle des clairvoyances.

Invité par Lydie dans une soirée
où l'illusionnisme apparaît être le but définitif de l'humanité
entre vodka jus de fruit et stroboscopique musique
devant ce style chic et toc un rien révolté
transmis par des générations d'explorations bourgeoises
Lydie me rentra pour ainsi dire dedans
féline griffes acérées dents hollywoodiennes
Vampirella de l'ère libérale
l'aisance de ceux qui n'ont rien à redouter de la vie
des destinées mystère de la génétique et du pognon
faîtes exclusives pour le matérialisme le plus cannibale.

Que pouvait elle me trouver ?
Les ongles sales qu'elle prenait pour un vernis Gemey
tignasse laquée à l'huile de vidange
un plouc rude et néanmoins malléable
un prochain salarié des entreprises Emmaüs.
En cale sèche sentimentale depuis mon arrivée lyonnaise
Lydie représentait un formidable catalyseur
des frustrations passées présentes à venir
je perdais l'équilibre à escalader cette montagne
de suffisance et de chair presque mature
je me déflorais l'imagination dans le précipice de son chemisier
fille immense réfrigérateur
où s'entassaient les mets de mes envies les plus folles.

Ses collègues apprentis mafieux
envolés vers d'autres contrées alcoolisées
installés nababs sur un sofa moelleux
Lydie dissertait les yeux révulsés sur des jouissances inconnues
j'étais partant déjà essoufflé dans les startings blocks
La nuit jubilait paranoïaque à se découvrir d'autres galaxies.
Quelques parades nuptiales conventionnelles plus loin
nus et convaincants nous entamions le Sacre du Printemps
Nul doute Nijinski aurait apprécié cette bacchanale.

Lydie harpie en sueur
dégoulinant le Bloody Mary par tous les pores de sa peau
me toisa et dans un râle convulsif cria
 - Je vais me farcir le prolétariat.
Fonça dare dare vers un tiroir sans secret.
Une thèse à enrichir un doctorat à étoffer ?
Rien d'original sous la grisaille
longtemps qu'il se faisait farcir le prolétariat
Par toutes les entrées d'usines et les cours de la bourse.
Strip tease inverse langoureuse elle ajusta le pipeau
avec la grâce Machiavélique d'un tortionnaire paternaliste.
Y en avait marre
tel un nucléon dans la seconde du Big Bang j'étais sur elle
et lui balançait une gaufre d'anthologie
un million d'années de coups au cul des guerres
de cent ans de trente ans de la défloraison des Amériques
de sécessions de successions de sévices de souffrances
la Commune en passant par l'Holocauste les Bosnie les Rwanda
toutes ces boucheries qui ne sont plus que des anecdotes
et celles à naître. Moi gueulant
Du Chili au Groenland Tous ces êtres filous jamais responsables
investis patentés d'une mission divine ou nationale
de mort lente ou rapide sous couvert
de conjonctures de croyances et autres fariboles magiques.
Tous les loqueteux liquidés au nom de la déesse sanguinaire Miss Profit
les gémissements des miséreux ne nous étoufferont jamais
Tu parles
j'en chialais
Elle valdingua dans les bibelots surfaits les fausses antiquailles
Geignante affalée une main sur sa joue le trombone en l'air
je décidais de m'éparpiller vers ma banlieue de traîne-patins.
Un nouveau chapitre s'écrivait Obstinément dans le petit matin.

Aujourd'hui je pousse un môme vers son devenir
lui même me poussant dans les tours de roues du landau vers le néant
sa mère a la poigne des femmes au bon sens inné
sauvageonne habillée de douceur
elle a assez de certitudes pour trois
j'enterre des rêves j'en exhume d'autres
une vie normale...
Quelquefois quand le ciel est trop lourd à porter
en souriant je pense à Lydie
à cheval sur le monde croqueuse de vide
On a de ces nostalgies, parfois...
Allez, salut...

 

oOoOo

 

 

 

     Des accroche-cœurs
     Entre ton délire et le mien
     Ont dénoué nos liens
     A la course au bonheur
     Il y a trop de leaders
     Je vois des laideurs
     Qui se façonnent sans fin
 
     J'ai cru goûter au fruit des origines
     Petite androgyne dans ton sexe
     J'ai fait la causette à Darwin
     En présence de tes ex
     Millénaires en multiplex
 
    Ce singe blond
    Se trémousse sur la musique House
    Ephèbe micheton
    Ses mèches au rebond
    Grisent en bleu
    Le vide de tes yeux
 
    C'est foutu pas de bol
    Ma coupe au bol
    N'inspire ni muse ni cieux
 
    Dans l'infernal Zig Zag
    Il t'a roulé comme un tabac
    De Virginie. Vierge ? Ô toi
    Quelle blague
    J'en rigole en pleurant
    Trempant l'acier de ma lame
    Qui déchire ton âme
    En fine plaie dentelée
    Couture désespérée
    Sur les haillons déliquescents
    De mes naïfs sentiments
 
    Des accroche-cœurs
    Entre ton souvenir et le mien
    Ont dénoué nos liens
    A la course au bonheur
    Il y a trop de leaders
    Je vois des laideurs
    Qui se façonnent sans fin.

 

oOo

 
 
 
 
 
 
Garde le piaf des urgences dans ton cœur.
 
  Planton dans ce couloir devant la porte pare-feu
  Attendant des plombes l'autorisation
  de pénétrer dans le saint du raccommodage humain.
  Mon amour avait encore ingurgité à la louche des bouchées
  de médocs sensés épanouir ses neurones à l'univers normalisé.
  Pas assez pour sauter le pas de la vie
  assez pour emmerder son monde.
  Nos mondes séparés par les battants d'une porte grinçante.
  A intervalles irréguliers le lent grincement indiquait
  un événement et toutes nos têtes misérables
  se tournaient vers cet entrebâillement de l'inconnu.
  Tous pendus aux lèvres du gros infirmier qui
  annonçait le nom et le fin des angoisses de l'élu
  ou le début d'autres.
  J'attendais emmuré dans les secondes
 
 
  Dehors, au travers de la fenêtre un oiseau tenace
  emportait des brins d'herbe sèche, aller et retour,
  choisissait, piquait, emportait recommençait
  inlassablement voletant intrépide dans son boulot d'oiseau.
  La vie c'était cela l'éternel acharnement
  de la nécessité d'un confort improbable.
  Ce monde qui s'acharnait à se détruire
  un oiseau s'évertuait à le reconstruire.
  On était tous déjà à moitié crevé dans ce hall,
  les biens portants comme les autres.
  Fêlés, alcoolos, suicidés, accidentés du cœur,
  de bagnole, les camés au crack, les autres de télé,
  de travail, de plus de travail, de sexe fossilisé,
  de mensonges absorbés.
  Tous aussi vide qu'un emballage de bouffe discount
  Sans un regard des uns aux autres
  Sans faiblesse dans cette indifférence pénitentiaire,
  tous enfermés dans nos cœurs, ça faisait longtemps
  Qu'on avait balancé les clés,
  adhérents cohérents, dans l'absurdité.
  Puis mon nom est sorti du scrabble des limbes,
  le toubib parlait au ralenti, j'écoutais rien,
  ça résonnait dans mon cerveau, tout allait bien,
  parait il.
  Au retour dans la bagnole, intercalé dans la file des pressurés
  l'humanité klaxonnait, gueulait, les bras au ciel, pressés
  de se jeter corps et âmes dans d'autres emmerdements.
  Le connard de derrière habillé en voiture dernier cri
  gesticulait dans le rétro, le poing brandi.
  Garde toujours le piaf des urgences dans ton cœur
  Garde toujours le piaf des urgences dans ton cœur.
  Que je me suis dit.

 

 

oOo

 

 

 

Poème à coller sur un frigo

 

Message

   

Ce matin qui t’emprisonne

Dans le rencard de l’ouvrage quotidien

Te presse à attraper

Le bus ligne Un.

Ta petite culotte,

Esseulée, oubliée,

Rose, sur la moquette grise

Repose légère

Prête à s’envoler.

Comme un vieux chat satisfait

Je m’étire dans la solitude

Et dénombre entre deux toiles

Les araignées qui supervisent mon cinéma.

J’aspire à grandes goulées

Des douces odeurs, les douces chaleurs

Que le lit a protégées

Et ce bonheur là

Interdit aux sentiments de pluie

Qui dégringolent sur notre toit

De se transformer en verglas.

Je suis du poste de l’après-midi

Te l’ai-je dit ?

Tu trouveras dans le réfrigérateur

Quelques plats fragiles

L’incertitude, l’attente et l’impatience,

Ne les mélange pas surtout à la lassitude,

Je sortirai de l’atelier

Où se fabrique le chagrin

A 21 heures,

Joyeux.

 

 

oOo

Assis sur le gourbis des pensées.

 

Assis sur le gourbis des pensées

Les doigts cramés par un bout de cigarette

Collée sur mes mains enduites de graisse

Mon bleu repu d'un p'tit dej de cambouis

D'un matin de printemps avec ce demi soleil enfumé

Qui s'étire au loin crachant ses poumons orangés

Sur les étoiles vacillantes accrochées au décor

ill Christophe M. sur des photos de BT

Et le petit Bouddha s'est déguisé en merle

A quelques pas il chante la non innocence

Il chante la fantasmagorie de la vie. 

Assis sur le gourbis des pensées

Entre ce mur Sncf et cet atelier

Où remuent tenaces des mottes d'herbe éparses

Où remue le silence de moins en moins d'ouvriers

La peau ressent ce déchirement du baiser dans le cou

Là même où tu l'as posé

La crasse et la sueur ne l'ayant pas effacé. 

Assis sur le gourbis des pensées

Dans ce repos improvisé

Se mêle le méli-mélo du monde rafistolé

L'écœurement candide de la fatigue

La saveur acide de l'étonnement d'exister.

    - Hé Tom , ta réparation a pas tenu, faut y retourner.

    - Bordel, c'est une éclopée du cœur cette machine.

Assis sur le gourbis des pensées

Face à l'infime immensité d'un bout de nuit fragile

La connerie est encore endormie

Un rien la fera gesticuler.

oOoOo

Le nouveau testament personnel et subjectif

 

En m'invitant dans la fiesta de la vie,

l'univers à égaré le carton d'invitation

et me voilà loufiat ( comme des milliards d'autres)

à chercher une planque pas trop inconfortable,

un peu d'amour et de calme

mais c'est sans compter

sur la panne d'électricité au seuil du Grand Soir

sur la dernière chanson déprimée du rebelle Renaud

sur dieu et sa bande d'abrutis sanguinaires

sur les grossistes des boutiques multinationales

sur le salon de la motoculture et du tripatouillage animal

sur la délocalisation des entreprises de confettis

sur la peine à jouir de l'égocentrique poésie

sur le one man show de la spectaculaire connerie

et son public connaisseur et ravi.

Sur un tas de fatras que nous enjambons chaque jour,

pauvres cloches.

Quand la mort m'enlacera sur un slow éculé

avec ses clins d'oeil d'allumeuse pubère

ou sur une disco débridée avec des petits cris jouissifs de travelo

sortir de la fête à son bras sera le point final

de foutus SOS éparpillés en pointillés

avec la satisfaction de celui qui s'est exténué

à rafistoler la ligne de flottaison du radeau jusqu'au bout

et hypocrite jure que c'était bien mais que toute

bonne chose à une fin.... Enfin.

oOo

 

Nous regardons

 

                                                                     jlmi

 

Nous regardons les corps déchiquetés et sanguinolents
 
Nous regardons la souffrance comme une part de la nécessité

Nous regardons les portes grinçantes des gagne-pain se fermer

Nous regardons le nombre anonyme des virés

Nous regardons les faits mais pas les causes

Nous regardons l’information fragmentée et sponsorisée

Nous regardons les scénarios d’espoirs moqués

Nous regardons avec fierté le design des bombes high tech

Nous regardons la programmation de l’anéantissement de nos rêves

Nous regardons l’individu sacralisé sans les autres

Nous regardons les beaux parleurs remuer les lèvres

Nous regardons la vacuité se proclamer Star,etc...,etc

Nous regardons le religieux resaler la soupe de l’ignorance

Nous regardons les trophées de la torture des animaux

Nous regardons le sourire mielleux des annonceurs de misères

Nous regardons les journalistes en costume de Monsieur Loyal

Nous regardons l’air étouffer et l’eau pleurer nos déchets

Nous regardons les écrans imbéciles se trémousser

Nous regardons le narquois contentement du mensonge

Nous regardons les droits de l’homme conspués

Nous regardons la morale méprisante des intellectuels médiatiques

Nous regardons les êtres vivants déniés

Nous regardons le vivant comme si nous étions hors de lui

Nous regardons mais nous ne voyons rien

Nous sommes inexcusables

oOo

Impromptu

 

   Elle dit que dieu est une fleur

   et que l'hiver il s'absente

   vérifier un autre monde dans une autre dimension.

   Elle dit que les hommes sont peut être bons.

   Elle dit peut être.

   Elle dit que la vie parle dans tous les atomes

   et qu'il est déroutant de ne plus savoir écouter.

   Elle dit que la vie est un cadeau du hasard

   pendant que dieu est dans une autre dimension.

   Elle dit que les océans sont des larmes de sirènes.

   Elle dit que le monde est une maison à l'abandon.

   Elle dit qu'elle est née dans le rire d'une explosion d'étoile.

   Elle dit que nous sommes des acteurs timides

   et des spectateurs aveugles.

   Elle dit qu'elle voudrait être une statue de Camille Claudel

   ou un tableau de Séraphine de Senlis.

   Elle dit que l'horizon est un trait de plume d'ange.

   Elle dit qu'elle aura trois enfants.

   Elle dit qu'il est bon de faire l'amour avec moi.

   Je lui dis OK Chérie. T'as raison

   mais me casse pas

   les burnes avec tes belles fariboles, juste après...

 

 

oOo

 

Les éclats de la pulsion

 

 

j'ai cherché les éclats de la pulsion dans l'effondrement de la réalité
j'ai cherché l'appui du pouce et le claquement du majeur contre la paume des planètes
j'ai cherché l'orchestrale saccade des bras rythmant la pulsation infime du temps
j'ai cherché des orbites curieuses pour rouvrir mes paupières closes
j'ai cherché la brûlure de ton regard dans le matin rouillé de gel
j'ai cherché la paix dans la chaleur sereine de tes expirations
j'ai cherché à peindre les lettres du désir et je me suis serré contre toi
j'ai cherché à éparpiller le silence et tu as posé ton doigt sur ma bouche
j'ai cherché la chorégraphie de l'inutile ton corps magnifie l'inertie de l'essentiel
j'ai cherché la frontière déséquilibrée du langage tu m'as montré une mappemonde
j'ai émigré dans tes paroles
et je n'ai plus de pays. Je suis bien

 

oOo

 

Le Grand Ordre de l’Univers

Depuis que le sureau noir
déchire l'herbe et le ciel
des martinets tentent d'envahir
la chambre où nous logeons
nos derniers rêves,
c'est de bonne guerre
la vie n'est qu'un vol
irrégulier vers un peu de confort.
Tu m'annonces souriante
une nouvelle qui te séduit
Paolo voudrait que tu vives avec lui
tu as éludé mais j'ai bien senti
que l'harmonie de nos instants glissait vers l'imparfait
quand de mépris tu as balancé mes poèmes
par la fenêtre ils se sont éparpillés
papillons griffonnés de traits incertains
je n'ai pas moufté autant dire que je m'en fous
j'ai allumé une clope et regardé le journal télévisé
avec cette nuit décolorée par les viseurs ultraviolets des soldats  américains
avec les épîtres concurrentiels du marché des apôtres de l'OMC.
Je me suis dit qu'il était temps de sortir le chien,
de remplacer le fuyant robinet de la cuisine,
de poster un poème lumineux à un revuiste illuminé et laborieux
avant qu'une bombe terroriste ou qu'un chanteur académicien
nous ensevelisse pour de bon dans l'inachevé.
En achevant la dernière moitié de la dernière bouteille de Morgon

 
                                                                © Marc Héron

j'ai téléphoné à Paolo pour lui souhaiter
bien du plaisir et que tu adorais te faire téter les seins
il le sait déjà...
Le vivant s'organise autour de petits détails
qui fondent le grand ordre de l'univers.

 

***

 
Oraison après date de péremption
 
Gérard est attifé de son plus chouette costard
une vraie gravure de mode
il ne laisse rien au hasard
c'est un mec élégant
mais ses nerfs lui portent la poisse,
pas commode
le genre rentre dedans,
il a laissé des tonnes de paperasses,
des photos, des bouts d'intimité
bien rangés
pour d'improbables héritiers.
L'ordre cache de sérieuses angoisses.
D'ailleurs il s'est flingué
un coup de 22 long rifle,
pensez donc, un 22,
évidemment, lui si soigneux,
ça ne fait qu'un petit trou,
juste assez pour que le néant
puisse entrer,
le voici quand même maquillé
d'un cocard géant
fardé d'un bleu de l'oreille jusqu'aux yeux
le reste du visage est blanc,
une gueule de déterré.
Il a toujours eu le goût du lyrique
le goût de la " grande " musique
mais cette orchestration là
l'a laissé sans voix.
Flics de prisons, nous voilà à veiller
le distingué gisant
des fois qu'il lui viendrait l'idée
de se barrer de l'éternité,
quand un copain s'est taillé
un signe dans la croix.
J'me suis tiré.
Gérard détestait les tralalas.
                                         

 ****

 
Sous cet orage du printemps
les gouttes de pluie semblent
des débris de verre qui lacèrent
ma peau en nervures de sang
 
Je bois au goulot
un rouge brique brûlot
dont l'acide vinaigre
de la vie possède le goût aigre
 
La pluie saoule les rigoles
le trottoir luit des reflets du monde
ma tignasse mouillée en rigole
de cet aspect épouvantail immonde
 
Ce monde immonde
ou ubiquiste et différent
l'on vous canonise marginal impotent
paria des mots beaux et nus
comme les courbes silencieuses de cette statue ingénue
aguichant la foule à tirer un divin coup de solitude
en fantasmant l'éternité et sa virginale sollicitude ( Hou ! Lala!)
 
Sigillographe de la nuit
je puise les détails incessants
de l'instabilité
Les yeux caméra rouge infra
découpent une silhouette apparue nue inanimée
fard bleu des paupières suturée aux fil de songes
androgyne que la pluie souligne
reflet du moi sur cet âme trottoir
 
Sous cette orage du printemps
les gouttes de pluie semblent
des débris de verre qui lacèrent
ma peau en nervures de sang
                                                        

 ****

 
Poème de la fatigue, dans l'impasse de la gare d'Annecy  
 

  illustration jlmi

 

 
Mes paupières closes
       sont des paravents
 que j'interpose
        entre la lumière et le néant.
  Alcôves sombres où virevoltent des points blancs,
         sont-ils neige nouvelle ou d'antan ?
  Cristaux ciselant les issues
        de vastes endroits
   de paysages méconnus
        ce que je sais de moi
            et ce que je ne sais plus.
                                               

****

Crash test

 

             

chanté par Jean-Pierre Baissac*

 

Ce chien fou couleur de nuit
qui gratte encagé le tapis des ciments
renifle les caresses du vent
comme on aspire la matinale nicotine transie.
La lune rousse teint ses cheveux en bleu aquarelle
sur le scintillement d'une boucle d'oreille
cette boucle d'amarrage qui tous les jours agrippe la vigie
des révolutions qui au final ne te sont pas imparties.
Ces " Pirates ", ces chats des contrebandes qui font du stop
sur mes sentiments kaléidoscopes
ont claqué leur sept vies dans le routage international
et en s'étirant se sont fait la malle
de mon blizzard de l'Est de l'Europe.
Mémoire vieille bouillie
maison ou vibre d'anciens bruits
errer là sans y être.
Ces êtres précieux se désintègrent
en scorie de diamants.
Ce n'est que l'urgence
que la nuit intègre
dans sa spirale folle
comme un gyrophare qui décolle
exercer de gracieuses pointes sur la corde raide.  
 
*   "Jean Pierre Baissac, un touche à tout extraterrestre, une des plus belle rencontre
de cette foutue vie. Faut pas lui en raconter... Il en raconte lui même et ça déménage
hardiment tout en lucidité, en sereine acidité envers ce monde si petit... C'est peut
être pour ça qu'il enfile souvent sa paire de boots de sept lieus, pour déchirer l'espace
et se rouler dedans. " Bruno Toméra

 

****

Disc-jockey
Avec toi salope funeste
l'amour courtois
se prend une veste
Il te faut plus que des chansons de gestes 
pour un passeport au Nirvana.
Comme dit le gros Bouddha
l'un s'unit dans les autres,
tu passes des uns aux autres
avec cette ferveur du postulat.
Ton canadair bourré d'essence
largue sur mes désespérances
partouzant dans l'entropie
de quoi flamber toutes mes cutis 
et ta peau blanche me démange 
moi qui suis mal blanchi.
Le néant se venge
en rognant la branche
où le désir est assis.
Je travestis sous ecstasy
le charnel silence des avances
que tu projettes sur des regards inconnus, 
frôlements des corps de la techno danse 
qui te balance, fiancée fantasque éperdue.
Lente danse errante ou une main sur tes reins
surfe sur les ondulations de la nuit,
affamé, ton cortex se nourrit
des stridences obsessionnelles
canardées par mes amplis.
Sous tes paupières suturées
mes pluies de pixels
sème l'ivraie de mon obsession 
et esquissent notre futur abandon.

 

Des gouttelettes de vie dans ma main pleine de morve

  Je marche à ses cotés
  Elle tient contre son coeur
  Contre sa blouse tachée de terre
  Une lettre chiffonnée
  On dirait un clown avec ses pompes de sécurité
  Elle pleure ça lui fait un nez en compote
  C'est tout mélangé
  Elle pleure, elle ne sait plus qui elle est
  Elle ne veut plus savoir qui elle est
  Elle trébuche sur elle même
  Elle s'effondre sur son ombre
  Elle s'abat contre mon ombre
  On se regarde dans ce miroir inversé
  Et puis les mots l'apaisent
  Et puis les mots la grandissent
  Et puis les mots la soulèvent
  Elle a le visage badigeonné
  On a pas de mouchoir
  Je prends la lettre de licenciement
  Et lui essuie le nez et lui dis
  Mouche toi et crache la dedans
  C'est tout ce que ça vaut.
 
 
***

Cette ronde infernale pieds nus sur un tapis d'éclats de verre

Gilles Barbier L’Ivrogne, 1999/Mac Val                photo jlmi

 

Terre, cette tête de larmes bleues
qui chuchotent ses plaintes.
Ces corps recroquevillés du petit matin délavés par les brumes glacées
et qui rassemblent dans des rêves ankylosés empêtrés de non sens
les quignons rassis émiettés dans le café refroidi de l'existence.
On devait être des millions à cette heure à se perdre dans le paradis conformiste
à s'inventer une vie déjà bien frelatée à coups de vagues projets trafiqués
par les gueules de bois et quelques sauteries fantasmées.
Trimballer son corps entre deux ivresses et deux lysanxia
entre le chant des mitrailleuses et le chant du cygne
entre les barbouzes médiatiques et leurs sentences libérales.
La nécessaire maquerelle Misère fardée de la bonne conscience de la dignité,
les gagne-pains se vident, il y a que dalle sur l'étal des boutiques
du prêt à penser, les perroquets savants adjurent d'une adaptation
à la survie dans une allégorie du néant, avec dignité.
J'ai balancé la radio par la fenêtre
j'avais pris du bide dans les pantagruéliques relais de la frustration,
c'était plus moi dans le miroir, c'était rien
Rien qu'un mp3 enrhumé d'un adagio de Barber
Rien que le temps passant et plus l'envie de le retenir
Rien que l'image floue d'une perception fossilisée
Rien que cette terrible supposition que le tour du cauchemar n'est qu'entamé
et qu'il n'y aurait jamais d'arrivée
Rien que soi en somme.
Il restait pourtant de belles choses à accomplir ( sic )
Se cramer les doigts sur un bout de cigarette
Essuyer le pipi du chien
Sourire benoitement du fébrile tremblement des jonquilles
Décompter les points retraite
Mater le tapin des étoiles
Déshabiller jusqu'à l'os ce charmant conte
que l'on nomme la vie.
 
 

***

Pièces rapportées

 

           

lu par Jean-Pierre Baissac

Lampadaires incolores, mon ombre déambulait entre ces rues de pierres jaunes,
la tronche ravagée par la Guinness. Boite de nuit de merde, ce connard me
branchait poésie, j'en avais rien à foutre de ses parachutages égotiques dans
les pourtours de sa libido, il s'emmerdait autant qu'un autre, je n'avais plus
besoin d'alibi, j'ai appris à m'en passer, c'est cela ma façon d'être poète,
je n'ai pas d'alibi. On était donc tous là à attendre l'autobus de la mort et
chacun un arrêt ou descendre et je rentrais dans cette morgue de la chambre
d'hôtel, entre ces murs gelés de la mort, avec ces décorations virtuelles, ces
draps élimés sans odeur, cet ennui gravé dans l'enclave de l'univers ou il n'y
avait rien à picoler, rien que de la sale solitude qui gouttait du plafond.
Mon frère crevait les poumons dentelés par des virus aux noms mystérieux, il faut
gaver de solennel ce qui nous échappe, mon frère crevait et je regardais ces femmes
vertes en sabots de plastiques et en uniformes verts et je me demandais si elles
portaient une culotte sous ce froc des urgences de l'hôpital Louise Michel, elles
cavalaient chaque fois qu'un être descendait à un arrêt et je visionnais sur mon
dvd perso haute définition les contours, le modelé de leur toison pubienne, l'odeur
de l'amour, l'odeur de la mort, monstre et voyeur, une psycho m'a dit plus tard
que l'on se protège comme on peut, je surnageais dans cette conscience ordonnée
et désorganisée qui flirt dans le sempiternel show du chaos.
Les pierres jaunes suaient et craquait sous le gel, j'attendais l'amour, je l'inventais 
muse à la peau blême, filles fleurs en dessous transparents sur les pages glacées
des pubs des magazines qui permettent de glorifier l'insatisfaction après une putain
de journée de boulot, des filles de pub télé qui déballent sous contrôle juste de quoi
se branler entre deux flashs catastrophiques, filles aux longs cheveux bruns qui me
faisaient bander, môme, quand je voyais ces hippies femelles balançant leur crinière
et leur hanche, connasses aussi tordues que leurs mères, leur jupe long rideau de
théâtre ou  je débutais dans le registre des fantasmes convenus et fabriqués par la
propagande du moment. Président escroc, sénateurs séniles, chefs de gangs
libéraux, mains idéalistes et crocheteuses, donneurs de morales surpayés, experts
caressant tous les sens du poil, tous fourgueurs de cames télévisuelles ou l'information
n'est qu'une anecdote frelatée de la sur-réalité. L'important étant de passer le temps,
tout le monde ingurgite la came de la peur en se prélassant dans de confortables
canapés. Adrénaline télévisuelle, le moi projeté dans les purificateurs cataclysmes.
les pierres suaient le gel par les fêlures, appuyé contre cette fontaine des souhaits
je traficotais mon existence comme un chien rouge sous les clignements d'œil
des étoiles qui se foutaient de ma gueule.
Vendre de l'impuissance, je vendais contre un verre des poèmes écrits sur des
cartons à bière, sur du papier sandwich et ils me rigolaient au nez leurs dents cariés,
leurs sourires imbéciles me trouaient le thorax, je plongeais dans mon océan houleux
et beau, seuls quelques coups de poing me ramenaient au graphique plat des connerie.
 je me fous du monde éperdument, éperdument.
Deux Bouddhas flics me poussèrent du bout de leur tantra loyaliste, j'étais sur la
bonne voie, plus loin, inconscients, des gens attendaient leur tour à l'arrêt d'autobus.
 
***
 

Funérarium 
 
La veuve me dit
- O mon pauvre Bruno, on est bien peu de chose.
- A qui le dites vous, lui dis je, en regardant le macchabée
gelé, allongé blanchâtre dans l'éternité.
Faut bien exorciser les départs, inciser le bubon, agiter les mouchoirs
avant de visser le couvercle et pousser le tout dans un coin de la mémoire
édulcorée.
Bon dieu, ceux qui nous précèdent ne sont que des empafés à nous rappeler
que la fusée pour le néant est parée pour nos zigues mais il est toujours plus
facile de pleurer sur la fatale inertie des autres parce que ça veut dire que l'on
est toujours debout à admirer la ligne d'horizon sur cette planète gracieuse et
qu'avec de la bouffe, un lit moelleux et les rondeurs d'une fille dedans, on
voudrait y squatter perpétuellement sans trop se poser de questions sur la
finalité du bouillon de culture. Et puis l'âme... Ce passe partout accommodant,
est elle convaincue de cette balade inédite dans le rien ? Posséder la
conscience de soi n'est pas assez, cette trouillarde conscience en veut des
frissons, alors l'âme c'est la suprême surprise, cerise sur le gâteau rance.
Et peut être que l'âme de mes chats écrasés m'attendent et puis l'âme de
cette cinglée de sardine suicidaire tenace à s'échouer sur cette plage de
matin du monde, trois fois je l'ai remise dans le sens du large et ces boucs
émissaires de taureaux qui canalisent toute la féroce inexistence de ces
bouchers en collant moule burnes scintillant et des traumatisés sexuels
jouissant de la souffrance avec leur pétoire lustrée à deux coups. Tous mes
animaux savent à quoi s'en tenir et n'en demande pas tant, de l'âme et du saint Frusquin.
Et puis l'âme des vieux journaux et leurs dépêches sanguinolentes et leurs
hommages niais immérités. Et l'âme de l'enfance innocente qui n'est qu'un
conte pour flatter le sentiment de survivance des parents devant ce parterre
de mioches, futurs connards aussi sûr que le sont leurs géniteurs. On
s'extasie bien sur n'importe quoi. Que l'on foute tout ça dans un colissimo,
direction les tréfonds de la galaxie la plus lointaine.
Côtoyer un ramassis de crétins vivants est déjà une épreuve, alors imaginer
se les taper dans l'au-delà, cela tenait de la philosophie tordue.
Une goutte fraîche d'eau bénite me sortit de ma torpeur méditative, la salle
de l'ultime repos était comble de spectateurs alléchés attendant contrits de
jouer le premier rôle, le goupillon ne chômait pas à balancer la sainte flotte,
un sérieux essorage s'imposerait bientôt pour le gisant impassible sous cette
giboulée sacrée.
Une abeille dans mon cerveau s'amusait d'un virtuose vol acrobatique. Etourdi,
je me dirigeais vers la flémarde lueur de la sortie d'un pas pressé. Pressé...
je me demande bien pourquoi ?...  
 
***
 
 
Atelier poste du matin.

 

Le vent déploie ses songes de Tulle gras
sur les blessures des songes métalliques.
Légers coups de burin
contre les roches friables de l'esprit
Fissures érosion
rien ne persiste vraiment
des normes giratoires des simagrées sociales.
Ma vie coincée entre les mors de l'étau
je fraise l'angle des émotions
je serai mort depuis longtemps
sans cette précision de l'ajustage.
Limailles de l'ébarbage des années
Poussières amas du moi
entassées dans des caisses de conventions.
le peu de soi écrasé par la frime
des non-dits condescendants
Le peu de soit autre que chiffre à sondage
le peu de soi assourdi par la si publicitaire normalité
ce peu de soi quotidien dans les salles d'attente
de l'extraordinaire et de la solidarité
comme un apprentissage du merveilleux
PARLE CAMARADE
Ne te tais plus.  

 

                              

 
 
Ophélie
 
C'est la lingerie du vent
découpée dans le patron de l'infortune
qui réchauffe tes vingt ans
et ce visqueux bitume
s'invente patinoire
le temps d'une rigolade et d'un espoir
 
Le trottoir étincelle sous les frimas
le soleil et tes breloques se gèlent dans ton cabas
deux fois rien dans le paquetage des zonards
c'est l'héritage d'un père nommé Hasard
 
Ophélie, Ophélie il n'y a pas assez d'eau
pour se noyer dans le caniveau
et ce paquebot que tu vois dériver
n'est qu'un rêve de papier
 
Tu griffes le silence
de plaintes acérées
les honnêtes gens n'aiment pas être dérangés
ceux là passent s'effacent
médaillés du mérite et de pieuses indifférences
 
Même l'amour n'est pas joli
entre la peur et la folie
quand aimer c'est se shooter pour se vendre
en dose en quart ou en partie
les hommes tu sais ne savent rien d'autre que prendre
 
Ophélie, Ophélie il n'y a pas assez d'eau
pour se noyer dans le caniveau
et ce paquebot que tu vois dériver
n'est qu'un rêve de papier
 
Tu danses dans les bras de l'hiver
sur les cubilots de l'enfer
la fosse commune à la fin du bal
et dans cette boite de nuit pas banale
les squelettes copains sont parés pour l'éternelle valse
 
Ophélie, Ophélie il n'y a pas assez d'eau
pour se noyer dans le caniveau
et les paquebots n'ont plus de place
pour les épitaphes des vies volontairement assassinées.
 
 
 
Gerda
 
 
Gerda ouvre son trois quarts
sous les étoiles peintes en aluminium
c'est le clou du Claque Bar
avec comme musiciens
les gueulantes frustrées des hommes.
 
Gerda éventre des comptines de Janis Joplin
entre deux Martini Gin
sans vice elle se hisse
sur le podium
championne incontestée
du pauvre stadium.
 
Sous les étoiles peintes en aluminium
Gerda savante artiste
balance son corps exhibitionniste
maboule je flanche
pour la blanche
chair de poule
que mon oeil goulu
deux mille ASA
impressionne.
 
 
***
"Je t'envoie deux " peintures poèmes " j'ai joui sur les traits fins de Popofe des mots comme des caresses, ma foi très sensuels mais jamais très sérieux, heureusement.            Tom"
 
Encre de Chine
 
 
 
 
***
Régalade galante
 
***

" Je te présente une peinture de Popofe Dumont, peintre habitant Bruxelles, nous avons un temps croisés, elle ses pinceaux, et moi mes mots. J'écrivais un poème et elle peignait ce qu'elle en voyait."

 

 @ Le dialogue silencieux
     
Tes doigts joints
ces fêlures de faïence,
la paume de tes mains
ce minuscule bol,
semble retenir des paroles
comme on retient l'eau fraîche
au jeu des rites enfantins.
Ta peau de tendre pêche
en a gravé des sortilèges
dans le carnet de santé du quotidien.
Ta peau que parfois tu abandonnes
pour ne laisser aucune trace
de ton ubiquité et ta chair saigne
des griffures du passé,
rien vraiment ne s'efface.
Le temps est sans gêne
à se confondre à l'intemporalité.
Ce matin dans cet hôpital
où l'espace est enfermé,
par delà la fenêtre, ton regard
tendait le pouce sur cette route nationale
qui déroule ses normalités,
je me suis assis près de ton errance
copilote de ton attelage du silence.
Le psy avec le sourire pressé de celui qui s'en fout
m'a poussé vers la sortie
où plutôt vers l'entrée
du monde malveillant des méchancetés.
Chez nous, il manque la moitié de notre vie,
la maison est peinte de léthargie.
Le chat ne fait plus sa tête de vieux chien,
pour ton retour il fignole des miaulements,
le moineau que tu as soigné
et baptisé " clown du vent "
vient tous les jours aux miettes de pain
et te croyant oiseau migrateur,
te réclame en pépiements chineurs,
il n'est pas tout à fait lui même.
Mais qui l'est ?

***

@ Il y a ceux...                   
 
Il y a ceux 
qui se pétrifient dans des lits qu'on croirait des radeaux
échoués sur des interprétations inachevées
quand le monde tempête l'inexprimé
Il y a ceux engloutis
par des nuits froides
qu'elle gèlent toutes paroles
on ne les entend jamais
et ils s'en foutent de toute façon
Il y a ceux qui voudraient couper le fil des jours
mais ils ont peur de dégringoler
ou peur de s'envoler
Il y a l'autre qui
boit une bière en boite
en matant le cul des filles comprimé dans des jeans rapiécés
et se dit que l'amour ne sait autant se déhancher
Il y a Eliana qui
du haut d'une tour HLM
suspend ses grimaces à l'intérieur d'une vitre
et elle voudrait traverser son reflet
Il y a un très vieux souriant
qui regarde jouer les enfants
en se disant qu'il va être temps
de lâcher le guidon à ces jeunes remplaçants
Il y a Elle ondulante sur une piste de danse
qui s'exerce à combler le vide des sentiments
avec un peu de prestance elle sera au top
dans la mise en scène des apparences
Il y a un fou à Varsovie
qui frotte le flou des morceaux de sa vie
dégoulinés de ses lunettes embuées
il écrit le télégramme de son existence
avec l'encre de la dernière pluie
Il y a elle il y a lui
qui se tiennent serrés dans un coin de la nuit
quand la multitude vous est hostile
le nous est une île
ou il est bon de se reposer
Il y a vous, il y a moi
Il y a ceux qui ne savent de chez eux
que le bord d'eux même
et ne le franchiront jamais

 

@ Évelyne

Évelyne a des langueurs
Évelyne a des vapeurs
Étendue sur un tapis de Chine,
Nue de sa main étroite et fine
Ondule les poils frissonnants
D'un triangle dont la somme
Des angles est égale à ses chavirements.
Déhanche ses pensées, d'un homme
Esprit dans ses fantasmes
Connaît les replis.
Et le doux tapis de Chine
Des tourments sait le drame
De n'être homme Chinois.
Zoomant l'inédit d'Évelyne
Me vint désir praline,
D'enfance, doigt tété,
De tranquille inconscience
Le goût renouveau de l'innocence
Évelyne écartelée
En Be Bop horizontal,
Danse la magnifique errance
D'une chorégraphie abdominale.
Choriste soliste, chant gémissement,
Intervalles mouvementés,
Sur son corail rose charmant
Subreptices et lascives poussées.
Paupières fermées,

Yeux intériorisés,
Religieuse gracieuse
Prie à l'infini spasme
cérébral d'électrochocs survoltés de l'orgasme.
Tout près d'Évelyne
Noyée sur le tapis de Chine,
A quelques pas, je suis là.
Laissant son amour monologue
A ses ébats. Car de l'épilogue,
Je n'y ai pas droit.
 

***

 

 
 
vous pouvez entendre les trois textes suivants en Poésie et Prose à haute voix
 
@  Le Meilleur Coup de la Terre
Elle arrive de loin, du fin fond du grouillant clinquant de la rue piétonne,
enveloppe flottante de tissu noir avec dessus un bonnet jaune troué,
les gens affairés ou nonchalants s'écartent désorientés par cette apparition
évadée d'une craquelure d'une toile de Jérôme Bosch.
    - T'as une clope et une petite pièce ?
Elle pue
elle n'a pas d'âge
antiquaire d'elle même
elle transbahute le présent défraîchi
dans deux sacs éreintés
par le poids de l'essentiel capharnaüm
de l'inutilité.
Je lui donne la clope et tire de ma
poche un bifton de cinq euros.
   - Sympa mon gars
     tu veux en siffler un ?
   - Je veux bien.
Elle sort d'un des cabas
2 gobelets plastique cradots et un litre entamé
   - Bois mon gars, beau temps aujourd'hui...
Nous buvons le picrate acide sous le soleil au milieu de l'agitation.
Je trinque avec la barmaid des enfers et c'est bon.
   - J'aurais vingt piges de moins, je t'aurais fait ton affaire...
     j'étais belle, ça me connaissait les beaux mecs... O des beaux gars...
Qu'elle rajoute
    - J'en doute pas, madame.
Elle sourit, des souvenirs clairsemés et joyeux doivent se superposer
sur les capricieux écrans de sa mémoire.
   - Faut que j'y aille, j'ai des affaires à régler.
Qu'elle dit d'un coup le regard gelé et perdu dans la nuit
d'un hiver instantané.
Elle se barre, trottinant instable sur les pavés
vers une aléatoire prolongation de l'existence.
Je la rattrape, lui colle une bise sur la joue
et lui dit
    - Sûr madame, Vous êtes le meilleur coup de la terre.
 
@  Entre Dijon et Nancy
 
Les néons blancs crépitent sur son visage,
de ses cheveux collés contre des rides
s'écoulent des sueurs
qui tachent le col de la blouse bleue,
elle frotte, insistante et courbée,
les ecchymoses du carrelage
d'un balai brosse démesuré,
en forçant sur ses mollets violets de veines éclatées.
J'évite hagard son chariot de munitions
à sulfater les bactéries
et gerbe dans l'évier un restant d'ineptie.
Ses yeux fatigués s'accrochent
comme des crocs dans ma nuque
puis indifférente s'en retourne à son chantier,
elle, qui efface dans l'aire de la nuit,
les empreintes des allées et venues.
Il me faut de ce café fort et dégueulasse
pour traquer la piste de l'humanité perdue.
 
@  Physique du Poivrot
 
Bar des Gachères
 
Combien de secondes prendrait la chute
si je décidais de sauter du bord du cendrier vert Heineken
cela dépendrait de l'emplacement du cendrier et de moi-même
par rapport à l'équateur, des turbulences, du climat,
de la position de mon corps et de sa résistance à l'air,
en écartant les bras je planerais quelques nanosecondes
le temps d'admirer le paysage des mégots si bavards
dont un des filtres est mordu d'angoisse et de solitude
un autre enrobé de rouge à lèvres prometteur d'érotisme extrême
un autre complètement baveux, un autre déchiré d'impatience
   ( ces mégots parlent plus que mon voisin de bar )
et puis m'écraser sur un tas de cendre.
Evidemment je ne compte pas mourir dans cette chute
c'est juste un désir d'action métaphysique,
sauter d'un cendrier vert Heineken ne demande aucun courage,
après un certain taux d'alcoolémie c'est tout naturel.
ce qui prouve que le saut lui a toujours un sens alors
que la vie n'en a aucun et que l'on passe les trois quarts de son temps
d'existence à s'emmerder et un petit quart à quelques illuminations
et puis que l'on en raconte des conneries
et que l'on ne s'en rend même plus compte.
 
Remuer le silence...
Remuer le silence jusqu'à ce qu'il bascule dans un vacarme assourdissant
et me perdre dans la tendresse de ton repos
quand les vagues de bombes s'apprêtent
à calmer définitivement nos rages de dents
quand les prisonniers fabriquent des cordes
pour se pendre sous le dernier rire d'un lever de soleil
quand les enfants sont prêts à être programmés
dans les fichiers d'une invraisemblable justice scientifique
quand des humains parmi d'autres humains sont emmurés
dans le coma éthylique de la solitude absolue
quand les êtres humains sont incapables d'êtres bons
 
Remuer le silence jusqu'à ce qu'il bascule dans un vacarme assourdissant
et me perdre dans la tendresse de ton repos ma Belle.
Duo déséquilibré dansant sous des éclats de lune.
Nous connaissons les hôpitaux psy et les regards désenchantés
quémandant une autre intuition du monde
nous connaissons les cages des flics et l'incompréhension
les bagarres sordides et les gueules de bois burinées sous les coups
de la haine et l'invention de l'amour dans les théories cupides
de bras étouffants
nous connaissons l'offense du mépris
nous connaissons le rejet des animaux abandonnés
et les bouts de nous mêmes écrasés sur la route des fous.
 
Remuer le silence jusqu'à ce qu'il bascule dans un vacarme assourdissant
et me perdre encore dans la tendresse de ton repos
pour que le calme s'agenouille enfin près de nos âmes
qui ne demandent rien à la vie et encore moins à la mort.
Me perdre dans la tendresse  de ton repos
ma main posée sur ton ventre
ma figure enveloppée de ta chevelure rouge
ma chair sensible contre ta chair sensible
mon sourire échos de ton sourire.
Me perdre encore dans la tendresse de ton repos
Et puis repartir
Remuer le silence jusqu'à ce qu'il bascule dans un vacarme assourdissant.
 
@ Une nuit  gueugnonnaise
 
Je pénètre ces portes de courants d'air
un simple instant à rouler des mécaniques
par l'entremise de grooms épistolaires
qui charrient leurs idoles dans mes neurones élastiques
je me rumine primaire dans l'aboiement des cohues
humainement ces décors transpirent le X Hardcore
au milieu de corps je me retrouve timide et nu.
Cette mémoire enfant comme une soupe bienfaisante
qui donne le change au romantisme adolescent
l'on veut mourir à vingt ans déjà par trop de dégoût
de mes quarante je ne me sens pas plus différent
il n'est pas d'âge au dépoussiérage du quotidien.
La vie n'a pas de fin ?...
Voilà de quoi flatter l'ego.
On laisse traîner là pour les amis
des fantaisies
des imaginaires à donner des boutons
aux cons des années d'urticaire
une bouteille de derrière les fagots
des feuilles sur la table
griffonnées d'amour en quelques mots
et de la douleur du monde être responsable.  
 

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En 1998 déjà, c'était d'la Mauvaise Graine !

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